Retraité EDF, militant CGT, la FSGT (Fédération Sportive et Gymnique du Travail) chevillée au corps, à 82 ans, Serge Pelforth poursuit son engagement, avec toujours autant de ferveur. Pour 2026, l’ancien pistard de talent prépare la commémoration des 90 ans des contre Jeux olympiques de Barcelone de 1936.
« Prend ce vélo, fais un peu de sport et arrête les manifs ! » Serge a tout juste 18 ans lorsqu’il reçoit de cet oncle cette offrande. Lui, jeune étudiant engagé dans la lutte pour l’indépendance des colonies françaises, qui n’a « jamais fait de vélo », reste à la fois perplexe, mais conquis par l’idée. Et, le jeune homme, fils du secrétaire général du syndicat CGT EDF de Toulouse, va foncer. Et ouvrir un chapitre de sa vie. Une parenthèse instructive et enchantée de cinq ans.
Comme un clin d’œil au père, licencié de l’entreprise pendant quatre ans, « suite à une grève très dure, soutenu tout au long de ces années par les camarades de la CGT qui déposaient de l’argent dans une urne à son nom », sa première course avec la FSGT, c’est à Blaye-les-Mines (Tarn), que Serge la fera, en soutien à une grève des mineurs ! « Et toutes les primes ont été remises à la Caisse des mineurs. »
Courir pour la cause et non pour la gloire ou le fric. Tel sera le fil rouge de ce talentueux modeste, communiste, présélectionné pour les JO de Tokyo de 1964, « ce qui n’avait aucun sens pour moi », contrairement aux Spartakiades, (sorte de contre jeux olympiques réunissant essentiellement des pays socialistes du bloc de l’Est) auxquelles il participera deux fois. Sportivement à l’époque, j’avais de bons résultats sur piste. Je faisais aussi régulièrement les courses d’après Tour de France avec Anquetil, etc.
Mais, l’échappée belle sera rattrapée, par un père soucieux de l’avenir de son fils et qui « va favoriser mon entrée à EDF. » Sans jamais perdre de vue le vélo, son entrée à EDF à Toulouse Sud, en 1965, marque l’ouverture d’une autre page de sa vie. Celle d’un militant CGT, « et ce dès mon entrée à EDF » et futur permanent syndical. Celle de la rencontre avec Guylaine, sa femme, militante CGT et fille de mineur. « J’avais demandé ma mutation à Paris. Et en vue d’intégrer le service STI j’étais en formation chez Siemens, là où elle travaillait. Et, il se trouve qu’on lisait le même journal. » Une fusion que le couple cultive depuis presque soixante ans du côté de Toulouse, après cet intermède parisien de cinq ans. Avec, en filigrane, le sport travailliste et ses vertus. Et pour l’ancien président de la ligue Midi-Pyrénées FSGT et fondateur du club de la CMCAS de Toulouse, le combat continue. « Aujourd’hui, nous ne sommes candidats à rien, mais partout où ils ont besoin de nous, on est là. Et si on peut, on fait. » À l’instar de ce projet pour 2026, fomenté avec l’Union des Conseils Sportifs de Catalogne. « Nous avons créé des liens et rencontré les membres de l’UCEC. Ils n’ont jamais oublié le rôle majeur de la FSGT dans le boycott des Jeux de Berlin et la réussite de la mise en place des olympiades populaires de Barcelone de 1936*. Aussi, ils souhaitent nous associer à l’organisation d’un événement sportif commémoratif pour les 90 ans en 2026. Il s’agit de rappeler l’engagement des sportifs contre les JO de Berlin à la gloire du nazisme et de prouver que le sport n’est pas neutre. Au-delà, notre coopération a pour objectif de développer le sport populaire. » À 82 ans, Serge n’a vraiment rien perdu de sa vélocité.
Stéphane Alesi
* Les jeux n’ont jamais eu lieu suite à l’arrivée au pouvoir du dictateur Franco.